Le constat est similaire à celui dressé un an plus tôt au col du Glandon. Le paysage sonore est pollué 31 % du temps en moyenne [2], et à des volumes bien trop importants. En effet, 74 % des détections dépassent le seuil de 5 dB(A). A titre d’information, même s’il ne s’applique pas aux bruits provenant des infrastructures de transports et ne concerne que des mesures de bruit faites en intérieur, le code de la santé publique indique qu’il y a atteinte à la tranquillité du voisinage ou à la santé de l’homme lorsque l’émergence globale des bruits de voisinages perçus par autrui est supérieure à 5dB(A) en période diurne.
Par ailleurs, cette pollution reflète le comportement des usagers : elle décroît légèrement pendant la pause méridienne et augmente de façon relativement marquée les week-ends.
Cependant, tous les utilisateurs de la route ne contribuent pas également au problème. Les motards sont en moyenne plus bruyants : les sons émis par les motos sur les trois sites instrumentés ont une émergence moyenne 4,6 dB(A) plus élevée que ceux émis par les voitures, ce qui correspond à un volume perçu 38 % plus élevé. De plus, l’écart entre les contributions des deux types de véhicules se creuse à mesure que le volume des nuisances augmente : 54 % des détections ’Moto’ dépassent 12 dB(A) d’émergence contre 33 % des détections ’Voiture’. Enfin, la palme de l’évènement sonore détecté le plus émergent revient à un passage de moto sur le col d’Izoard, avec 55,3dB(A).
Le col Izoard se distingue des deux autres par l’importance relative des nuisances sonores liées aux motos. Sur les sites du Cucheron et de Daluis, la pollution sonore liée aux voitures couvre environ quatre fois plus de temps que celle des motos alors que, sur le site e l'Izoard, la proportion entre ces deux catégories de véhicules est quasi-équilibrée. C’est également au col Izoard que les pics de fréquentation dominicaux des motards sont les plus visibles.
Cette nouvelle campagne de mesures a permis de dresser un constat chiffré et objectif : la pollution sonore liée au trafic routier dégrade l’environnement montagnard y compris au cœur d’espaces protégés pour leur biodiversité ou leur paysage (Parc naturel régional, Réserve naturelle régionale ou site classé). Cette forme de pollution trouble la quiétude que les visiteurs et les riverains qui ont choisi ces lieux sont en droit d’espérer.
Tout l’enjeu des prochains mois sera donc de travailler entre partenaires à la mise en place de mesures concrètes de réduction des nuisances. Ce ne sont pas les pistes qui manquent : fermetures temporaires de routes ; favorisation d’alternatives en mobilité douce en lien avec la campagne « Changer d’approche » de Mountain Wilderness ; limitations de vitesse et contrôle effectif du volume sonore à la source ; … et ces mesures devront être adaptées aux contraintes des différents territoires et de leurs hôtes. Il pourra être envisager d’avoir à nouveau recours à la biophonie pour mesurer l’efficacité de ces mesures.