La Salamandre de Lanza (Salamandra Lanzai) est une espèce d’amphibien endémique des Alpes Cottiennes. Elle se répartit en Italie entre le Val Sangone au Nord et Pian del Re au Sud. En France elle est uniquement présente sur la commune d’Abriès-Ristolas ainsi que le montre la carte ci-dessous.
Cette charmante salamandre noire, d’environ 15 cm de longueur, se déplace tranquillement, jusqu’à 12 mètres autour de son terrier, dans des habitats humides, alors même qu’elle n’a pas besoin d’eau dans son cycle de vie. En effet, contrairement par exemple à la Grenouille rousse qui pond ses œufs dans l’eau, elle a pu se maintenir au sein de son milieu contraignant en altitude en gardant ses petits dans son ventre jusqu’à ce qu’ils arrivent à un stade de développement de forme d’adulte, avec des pattes. Sa gestation peut donc durer 4 années !
Étant donnée sa petite aire de répartition, elle fait l’objet d’une attention toute particulière en Italie et en France avec des études pour mieux la connaître et la protéger.
Deux champignons du genre Batrachochytrium sont connus actuellement pour provoquer des mortalités massives chez les amphibiens dans le monde entier. Ils se développent sur la kératine (pièces buccales des têtards, épiderme des juvéniles et des adultes) et peuvent amener la mort des individus infectés. La première espèce, identifiée en 1999, Batrachochytrium dendrobatidis (Bd), est responsable d'importants foyers de mortalité dans au moins sept pays (Amérique du Nord et Centrale, Australie, Europe). Il est largement réparti en France, mais les seules mortalités qui lui soient attribuées sont dans des lacs isolés d'altitude des Pyrénées. En 2013, une nouvelle espèce, Batrachochytrium salamandrivorans, a été identifiée aux Pays-Bas, en relation avec des mortalités massives de Salamandre tachetée.
Ce champignon s’avère particulièrement pathogène pour les salamandres d’Europe.
Afin de veiller à ce qu’il n’apparaisse pas sur la population de Salamandre de Lanza, avec des effets pour l’instant inconnus mais potentiellement catastrophiques, les gestionnaires d’espaces naturels concernés par cette espèce ont décidé de surveiller une éventuelle apparition de ce pathogène. Pour cela ils se sont rapprochés de l’École Pratique des Hautes Études à Montpellier qui pilote un programme national d’étude des maladies des amphibiens (http://www.alerte-amphibien.fr) et de l’Université de Madrid.
Avec des précautions de désinfection pour ne pas diffuser le champignon, 295 frottis cutanés avec des écouvillons stériles (figure 4) ont ainsi été réalisés en 2018 et 2019. Les animaux testés se répartissent dans toute l’aire de répartition. Afin de connaitre la présence éventuelle de ce champignon chez d’autres espèces d’amphibiens en contact, les espèces suivantes ont également fait l’objet de diagnostics (Bd) :
- Des Salamandres de Lanza : 51 en France et 181 en Italie ;
- Des Salamandres tachetées : 4 en Italie ;
- Des Grenouilles rousses : 24 en France et 35 en Italie.
Ces prélèvements sont ensuite stockés au frais puis transportés avec soin à Montpellier. Au laboratoire du Centre d’Ecologie Fonctionnelle et Evolutive, des analyses de biologie moléculaire permettent de rechercher la présence de ces champignons.
Les résultats ont permis de révéler la présence d’une larve de Salamandre tachetée positive au Bd dans le Val Pellice, à proximité de la population de Salamandre de Lanza (1,5 km). Bd n’a pas été détecté chez aucune Salamandre de lanza et Grenouille rousse.
Ces résultats indiquent que, pour l’instant, la population de Salamandre de Lanza est exempte de ce champignon. En revanche, la proximité entre une sous-population de Salamandre de Lanza et une Salamandre tachetée porteuse du champignon en Italie permet d’orienter la vigilance sur cette zone spécifique de contact potentiel entre les espèces.
C’est ainsi que dans les années à venir des prélèvements seront réalisés dans cette zone spécifique en Italie, ainsi que quelques autres avec un échantillonnage plus léger sur l’ensemble de l’aire de répartition. Le laboratoire de Montpellier, dans le cadre de sa mission de surveillance et de recherche, poursuit son effort d’analyse aux côtés des gestionnaires pour veiller à ce que la population de Salamandre de Lanza ne soit pas mise en danger par ce champignon.